Transports, activités professionnelles, voisinage, lieux récréatifs : le bruit est omniprésent dans l’espace urbain. Vue du périphérique parisien.
Publié le 29.12.25 - Temps de lecture : 3 minutes

Les décibels, cette menace que l’on peine à entendre

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Transports, activités professionnelles, voisinage, lieux récréatifs : le bruit est omniprésent dans l’espace urbain. Alors que la pollution sonore peut altérer la santé et dégrader la qualité de vie, comment rendre les villes plus silencieuses ?

À RETENIR

  • Un quart des Français est exposé à des niveaux sonores nocifs, avec des conséquences sanitaires graves et un coût social supérieur à celui du tabac, selon l’ADEME.
  • Le bruit urbain provient principalement des transports (routier, ferroviaire, aérien), mais aussi des activités professionnelles, récréatives et du voisinage.
  • Des solutions existent : limitation de vitesse, radars antibruit, écrans acoustiques et plans d’action autour des zones bruyantes imposés par la directive européenne.
  • Des villes comme Paris, Lyon ou Rennes développent des zones calmes et des aménagements végétalisés, intégrant la lutte contre le bruit dans la transition écologique.

Un Français sur quatre est exposé à des niveaux sonores dangereux pour la santé, pour un coût social considérable de 147,1 milliards d’euros, estime l’Agence de la transition écologique (ADEME). C’est davantage que le tabac. En 2022, le rapport Frontières du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) avait même établi que la pollution sonore en milieu urbain représentait l’un des risques majeurs pour la santé publique mondiale. En effet, le bruit peut occasionner des déficiences auditives, des troubles du sommeil et des difficultés d’apprentissage. Il peut aussi perturber le système endocrinien, générer du stress, aggraver les états anxio-dépressifs, et favoriser l’obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires. Un bruit de fond de 60 décibels (dB) est suffisant à lui seul pour augmenter le rythme cardiaque et la pression artérielle. La pollution sonore n’est pas seulement désagréable, elle est également un véritable enjeu de santé publique.

Dans un contexte où les grandes agglomérations cherchent à devenir plus apaisées, inclusives et durables, la lutte contre le bruit s’inscrit pleinement dans la logique d’une ville qui prend soin de ses habitants et du bien-être collectif. Alors, comment garantir un environnement sonore de qualité pour tous?

En ville, le bruit est partout

Dans l’espace urbain, les transports représentent les deux tiers de la pollution sonore, le bruit routier produit par les automobiles, les deux roues motorisées, les camions et les bus arrivant en tête avec plus de la moitié des nuisances, auquel il faut ajouter le bruit ferroviaire et le bruit aérien. « Aujourd’hui, la moitié de la population française est exposée au bruit des transports. C’est un risque invisible qui ne bénéficie pas encore d’une véritable prise de conscience », explique Justine Monnereau, juriste et responsable du pôle communication et ressources au sein du Centre d’information sur le bruit (CidB).

Ensuite, on trouve le bruit généré par les activités professionnelles, puis celui des lieux récréatifs : bars, discothèques, terrasses. En dernière position, les bruits de voisinage représentent la gêne que l’on peut causer entre voisins, qui peut être amplifiée par la mauvaise isolation des murs, la réalisation de travaux dans un immeuble ou la présence de chantiers de construction à proximité des habitations. La démultiplication des sources d’exposition et l’impact très important du trafic routier sur l’environnement sonore font que le bruit est présent partout en ville, la plupart du temps au-delà du seuil de risque pour la santé, qui se situe à 80 décibels.


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Les solutions antibruit

Pour agir contre le bruit, les municipalités peuvent limiter la vitesse de circulation sur certains axes particulièrement sensibles, notamment en instaurant des zones 30. À ce titre, depuis 2002, la directive européenne relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement contraint les collectivités à établir une carte des zones les plus bruyantes afin de mettre en place des plans d’action, notamment autour des infrastructures de transport, des routes, des voies ferrées et des aéroports.

En complément, les collectivités peuvent également installer des radars pédagogiques pour sensibiliser les conducteurs au bruit. « Ces dispositifs fonctionnent comme les radars classiques en mesurant l’intensité sonore d’un véhicule. Rouler trop vite, klaxonner pour rien, accélérer au feu rouge, trafiquer un pot d’échappement amène le véhicule au-delà du seuil réglementaire », précise Justine Monnereau. Par exemple, afin d’inciter les citoyens à modifier leurs comportements, la métropole de Nice s’est équipée de 36 radars antibruit installés sur des poteaux.

Autre solution : les collectivités peuvent déployer des dispositifs acoustiques urbains afin de former des boucliers phoniques dans les endroits les plus exposés. Ces équipements peuvent être insérés entre le trottoir et la route, comme une glissière de sécurité.

À Paris, 24 écrans acoustiques ont été installés sur 14 km le long du boulevard périphérique pour protéger les logements, les écoles et les espaces publics.

Vers des villes de plus en plus apaisées

Levier majeur de transformation, l’instauration d’espaces apaisés est un moyen efficace pour préserver le silence en ville. Ce sont des endroits faciles d’accès où le calme est sanctuarisé, comme des zones piétonnes ou des parcs et jardins, ce qui permet aux gens de ne pas être exposés à des volumes sonores importants. Par ailleurs, les sons agréables, comme ceux de la nature ou produits par la voix humaine, sont recherchés par opposition aux bruits incommodants. À Lyon, sept zones calmes de « reconnexion avec la nature » ont été aménagées dans le parc de Parilly et le domaine de Lacroix-Laval. À Rennes, la métropole dispose de sept zones identifiées comme entièrement calmes (exposées à un niveau sonore inférieur à 55 dB), et de onze autres sites partiellement calmes (soumis au bruit routier seulement dans de faibles proportions). La liste de ces zones calmes a été établie à partir d’études techniques qui croisent données acoustiques et usages. Autre exemple de ce silence retrouvé à Strasbourg, où les cours d’école ont été végétalisées et désimperméabilisées, la terre remplaçant le béton, pour diminuer la réverbération du son.

Lancé en 2024, le label Quiet, une certification gratuite proposée par le CidB, valorise ces zones de calme pour favoriser le partage des bonnes pratiques entre les territoires. « À terme, la lutte contre le bruit gagnerait à être incluse dans la transition écologique, car agir sur l’aménagement urbain et la rénovation des bâtiments offre l’opportunité d’agir sur l’isolation acoustique. En adoptant les bons comportements et en prenant des mesures appropriées, nous pouvons améliorer notre environnement sonore », conclut Justine Monnereau.

Envies de ville : des solutions pour nos territoires

Envies de ville, plateforme de solutions pour nos territoires, propose aux collectivités et à tous les acteurs de la ville des réponses concrètes et inspirantes, à la fois durables, responsables et à l’écoute de l’ensemble des citoyens. Chaque semaine, Envies de ville donne la parole à des experts, rencontre des élus et décideurs du territoire autour des enjeux clés liés à l’aménagement et à l’avenir de la ville, afin d’offrir des solutions à tous ceux qui “font” l’espace urbain : décideurs politiques, urbanistes, étudiant, citoyens…

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