
Municipales 2026 : « C’est à l’échelle locale qu’on peut le mieux et le plus protéger la démocratie »
Dorian Dreuil, co-auteur de l’ouvrage "Les villes, nouvelles fabriques démocratiques"
Dans Les villes, nouvelles fabriques démocratiques (Fondation Jean Jaurès / éditions de l’aube), Dorian Dreuil et Marinette Valiergue dressent un panorama des innovations démocratiques locales en France et à l’international. Un ouvrage bref et accessible, conçu comme une « boîte à outils » à destination des élus, candidats, associations et citoyens désireux de renouveler la pratique politique à l’échelle locale. Entretien avec Dorian Dreuil, co-auteur de l’ouvrage.
À RETENIR
- L’ouvrage Les villes, nouvelles fabriques démocratiques défend l’idée que l’échelle locale est un levier essentiel pour réinventer et renforcer la démocratie, face à la méfiance croissante envers les institutions nationales.
- Il propose une « boîte à outils démocratique » articulée autour du vote, de la participation et de la délibération, illustrée par des exemples concrets en France et à l’étranger (Romans-sur-Isère, Kremlin-Bicêtre, Bruxelles).
- L’objectif est de promouvoir une démocratie continue, fondée sur la complémentarité des dispositifs démocratiques, où les citoyens sont impliqués durablement dans les décisions locales.
- À l’approche des municipales de 2026, l’ouvrage encourage les candidats à faire de la démocratie un enjeu central, en misant sur l’expérimentation, l’innovation, la co-construction et la participation citoyenne.
Pourquoi ce livre, et pourquoi maintenant ?
Dorian Dreuil : Pendant longtemps, la question démocratique a été vue comme un sujet d’experts. On nous disait que ce n’était pas un sujet d’opinion. Or, depuis 2017, toutes les grandes mobilisations sociales ramènent à cette question. Pas toujours de manière explicite, mais elle est partout. En parallèle, on observe une méfiance croissante envers les institutions nationales. Ce qu’on appelle la « démon-anxiété » : le sentiment que la démocratie ne fonctionne plus comme elle le devrait. Mais à l’échelle locale, il reste un espace protégé. C’est là qu’on peut innover, réconcilier, imaginer autre chose. Ce livre, c’est une tentative de mettre en lumière ce qui fonctionne déjà, ici ou ailleurs, et de donner envie d’agir.
Vous parlez d’une « boîte à outils démocratique ». Qu’y trouve-t-on concrètement ?
Dorian Dreuil : On a structuré le livre autour de trois formes de légitimité démocratique : le vote, la participation et la délibération. Et pour chacune, on donne des exemples réels. Par exemple, certaines communes ont vu émerger des listes citoyennes issues de collectifs locaux, avec des programmes construits en intelligence collective. À Kremlin-Bicêtre, des référendums locaux annuels permettent aux citoyens de voter sur des sujets très concrets. Et à Bruxelles, des commissions délibératives mixtes réunissent des élus et des citoyens tirés au sort pour proposer des mesures qui sont ensuite débattues par le Parlement. Ces outils existent, ils sont efficaces, et surtout, ils peuvent être reproduits.
Vous insistez sur la complémentarité de ces outils. Pourquoi est-ce important ?
Dorian Dreuil : Parce qu’il ne faut pas les opposer. Le tirage au sort n’empêche pas le vote. Une convention citoyenne ne remplace pas un conseil municipal. L’enjeu, c’est de faire cohabiter ces formes, de les articuler. C’est comme ça qu’on crée une démocratie continue, ou du quotidien. Une démocratie où les citoyens sont associés régulièrement aux décisions qui les concernent.
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À l’approche des municipales de 2026, que peuvent faire les candidats ?
Dorian Dreuil : Je me garderais bien de donner des conseils, parce que je n’exerce pas de mandat. Mais ce que j’observe, c’est qu’il ne faut pas mettre de côté la question démocratique. Il faut en faire un vrai sujet de campagne, un vrai sujet de débat. Parce que derrière le mot « démocratie », il ne s’agit pas seulement d’ingénierie institutionnelle ou d’organisation. C’est un processus. Les gens y projettent aussi la question de la dignité citoyenne, de leur place sur leur territoire, de leur capacité à s’y sentir pleinement acteurs. Et derrière cela, il y a la cohésion sociale, le vivre-ensemble. Il faut recréer des espaces physiques, pas seulement numériques, où les gens peuvent se rencontrer, se reparler, mieux se comprendre. Ensuite, il faut oser. Être innovant. Tester des choses. Voir ce qui marche, ce qui ne marche pas. Et surtout co-construire.



