Les halles centrales de Limoges
Publié le 29.06.23 - Temps de lecture : 3 minutes

À Limoges, « le centre-ville se remplit à nouveau »

Plus grande des agglomérations françaises ayant bénéficié du programme Action cœur de ville, Limoges a vu son centre-ville se métamorphoser. Retour sur cette reconquête de l’espace urbain avec Vincent Léonie, adjoint au maire en charge de l’urbanisme et vice-président de Limoges Métropole.

Comment caractériser l’évolution du centre-ville de la capitale limousine, ces trente dernières années ? À l’instar de nombreuses « villes moyennes », a-t-elle connu une perte de vitesse, avant un redressement plus récent ?

Vincent Léonie : Oui, mais avec un léger décalage dans le temps par rapport à d’autres territoires. La ville a en effet connu une perte de vitesse, notamment avec la régionalisation (actée en 2016, ndlr), qui a entraîné le départ de centres de décision et donc de cadres. En perdant notre statut, nous avons constaté une fuite vers la nouvelle capitale régionale, Bordeaux. À cela s’est ajouté, dans les années 2010, un départ des habitants vers la périphérie, au sein de la communauté urbaine. Au total, nous avons perdu 10 000 habitants selon l’Insee. Or, nous sommes en train de vivre une forme de rebond, là où il est déjà arrivé chez d’autres. Depuis deux ans, la population se stabilise. Une dynamique des ventes immobilières se met en place, avec un vrai rattrapage des prix : + 25 % à l’échelle de dix ans et + 9 % en deux ans.

Une dynamique des ventes immobilières se met en place.

Quel rôle a joué le dispositif Action cœur de ville ?

Vincent Léonie : Action cœur de ville a permis de définir un périmètre et de structurer notre action. Le premier volet important concerne la rénovation urbaine. Nous avons accompagné des copropriétés en difficulté, initié des opérations de restauration immobilière, lancé des phases d’acquisition-amélioration, etc. Ces outils permettent notamment de transformer le quartier des Portes Ferrées (un quartier prioritaire de la politique de la ville – QPV) en écoquartier. Par ailleurs, nous avons lancé la réhabilitation de la Caserne Marceau, qui se traduit aujourd’hui par un appel à manifestation d’intérêt auprès des promoteurs. Au sein de cet ensemble, les travaux du « Bâtiment 25 », tiers-lieu dédié entre autres aux métiers de la céramique, ont bien avancé. Le deuxième volet majeur porte sur le développement commercial, avec notamment la mise en place d’une pépinière commerciale, en partenariat avec la CCI de Limoges, pour encourager l’implantation d’indépendants. Et bien sûr, il y a eu la rénovation des halles centrales, il y a trois ans.

On espérait un succès, mais pas autant.

A-t-elle été une réussite ?

Vincent Léonie : Nous n’avons jamais connu une telle affluence. On peut y passer tous les jours et à toute heure, il y a toujours du monde qui vient acheter, consommer sur place ou participer aux nombreuses animations. On espérait un succès, mais pas autant. Ce projet correspond bien à l’air du temps : le lien, la proximité, se retrouver autour de bons produits. Même si c’est un peu plus cher parfois, on en prend un peu moins et on consomme mieux.

L’affluence vers les halles irrigue-t-elle le centre-ville ?

Vincent Léonie : Par capillarité, le succès des halles incite les gens à se rendre dans les commerces alentour. Nous constatons ainsi une diminution du taux de vacance commerciale de deux points en deux ans, qui est passé de 14,6 % à 12,4 %. Le centre se remplit à nouveau ; des enseignes marquantes, comme Starbucks ou Primark, s’intéressent à Limoges. Quoi qu’on pense de ces marques, elles constituent des marqueurs urbains. Il y a encore cinq ans, on en rêvait.

Quels sont les autres axes du projet Action cœur de ville ?

Vincent Léonie : Les mobilités, avec la mise en place de navettes électriques pour desservir le cœur de ville qui se piétonise. Nous portons également le projet d’un bus à haut niveau de service (BHNS) qui serait financé par Action cœur de ville à hauteur de 140 millions d’euros sur un total de 270. La phase d’étude et de concertation est en cours, pour une mise en service d’ici quatre à cinq ans. Enfin, les volets culture et qualité de vie sont structurants. Limoges est une grande ville à la campagne. Nous faisons entrer la campagne dans la ville en réaménageant les parcs de centre-ville et en végétalisant les places et les rues.


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Pour les élus, quelle est la principale difficulté à mener une rénovation complète du centre-ville ?

Vincent Léonie : Il faut gérer le temps long, celui des projets, tout en ménageant les attentes du moment, avec de la concertation et de l’accompagnement. Prenons l’exemple de la restructuration des rues du Clocher et du Consulat dans l’hypercentre. Avant les travaux, on disait : « la mairie ne fait rien ». Pendant les deux ans de travaux, les commerçants se sont montrés particulièrement critiques, malgré les nombreuses mesures d’accompagnement pour éviter des fermetures : des compensations ont été accordées avec l’appui d’une commission qui mesurait la perte de chiffre d’affaires. Après les travaux, chacun constate la réussite de l’opération, mais tout le monde a oublié le long travail qui a été fait. C’est le jeu !

Limoges figure sur la liste des bénéficiaires du deuxième volet d’Action cœur de ville, tout juste lancé, qui met l’accent sur la transformation des entrées de ville. Quelles sont vos perspectives en la matière ?

Vincent Léonie : L’enjeu des entrées de ville relève du développement économique. Nous avons des problèmes de déshérence commerciale route de Toulouse, à l’entrée sud de la ville, sur l’ancienne route nationale. Nous avons mis en place un périmètre dédié pour redynamiser cette zone, une action centrale pour le deuxième volet d’Action cœur de ville. Le contexte a changé. Pendant des années, nous avons freiné l’arrivée de grandes surfaces commerciales « classiques » en périphérie. Aujourd’hui, ce sont les hard discounters qui cherchent absolument à s’implanter ou à s’agrandir. Ils s’installent à certains endroits, créent de nouvelles polarités, puis laissent parfois des friches. Au Colombier, nous avons bloqué un projet en préemptant le site. Nous estimions que c’était un quartier d’habitation qui devait le rester. Au bout du compte, nous avons eu gain de cause, puisque les porteurs ont arrêté leur idée de zone commerciale et vont construire des logements. Il faut impérativement de la concertation en amont, quitte à être fermes sur nos positions. Afin d’éviter les friches commerciales, nous devons aujourd’hui nous limiter aux projets qui sont lancés ou annoncés, mais pas aller au-delà.

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