Le miroir d’eau de Bordeaux (©Istock)
Publié le 07.06.22 - Temps de lecture : 3 minutes

Baisser la température en ville : un éventail de solutions

Les chiffres sont alarmants : + 2,3 °C en 2020 en France métropolitaine par rapport à la moyenne 1961-1990, + 1,3 °C à + 5,3 °C d’ici la fin du siècle en fonction des scénarios du GIEC, deux fois plus de vagues de chaleur à prévoir sur notre territoire d’ici 2050. Les espaces urbains sont en premières lignes, particulièrement touchés par des vagues de chaleur récurrentes. Faire baisser la température en ville est devenu un enjeu important pour les collectivités locales. 

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« Il y a des solutions qui viennent de la nature, des arbres, des parcs, de la végétation, des cours d’eau, des solutions grises et techniques relatives aux revêtements des sols, au mobilier urbain, aux bâtiments, comme les structures d’ombrage, les revêtements drainants ou autres isolants thermiques, explique Marjorie Musy, directrice de recherche au Cerema (établissement public qui accompagne les collectivités territoriales pour l’élaboration, le déploiement et l’évaluation de politiques publiques d’aménagement et de transport). Mais aussi des solutions dites « douces », liées aux adaptations individuelles et sociétales, comme les changements de mode de transport ». L’ombrage ainsi qu’une bonne gestion de l’eau et des végétaux, semblent être un trio gagnant pour rafraichir les rues et les places. « Il faut aussi végétaliser les berges des rivières pour une meilleure diffusion d’un air plus frais et réfléchir aux matériaux employés dans les espaces publics. Les pistes cyclables entièrement bitumées posent, par exemple, un problème. » considère-t-elle.


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Des solutions combinées pour faire baisser la température en ville

L’établissement qui dépend du ministère de la Transition écologique a contribué à un un guide publié par l’ADEME en 2021, qui donne des éléments concrets sur les différentes familles de solutions (vertes, grises et douces) d’adaptation climatiques. Ce sont ainsi 19 fiches qui résument leurs impacts, en donnant des exemples concrets de mesures ou résultats de simulations dans des villes.
Les métropoles, tant à l’échelle nationale qu’internationale, se sont emparées de cette problématique.
« En France, Lyon et Paris sont particulièrement intéressantes car elles mènent des politiques en même temps qu’elles les évaluent », note cette spécialiste de la question climatique.

Dans la capitale, une étude de modélisation a évalué l’efficacité d’une combinaison de plusieurs solutions de rafraîchissement urbain. Des parcs et espaces verts irrigués représentant 10 % des espaces de la ville, l’isolation des bâtiments ou encore l’augmentation des températures de consignes de la climatisation de 23 °C à 26 °C (bureaux) et 28 °C (résidentiel), sont autant d’actions qui ont été testées ensemble. Leur mise en œuvre commune, permettent un rafraîchissement de l’air extérieur jusqu’à 4,2 °C la nuit.*

La commune d’Aubervilliers, en région parisienne, a aussi intégré plusieurs solutions de rafraîchissement comme la plantation de 72 arbres et l’aménagement de revêtements clairs et poreux. Le stress que représente de fortes chaleurs pour un piéton a été aussi pris en compte. La création d’ombrage par les nouveaux arbres s’est traduite par une réduction de la température de l’air et de la température moyenne de rayonnement. L’eau est également un élément précieux dans la lutte contre la chaleur en ville.

Favoriser l’évaporation de l’eau

« Des villes ont engagées des politiques intéressantes de rafraichissement comme Singapour, San Diego, Montréal sur la végétalisation ou encore Berlin sur la désimperméabilisation et la renaturation des sols », note Marjorie Musy.

Les bassins, jets d’eau, les brumisateurs et autres fontaines sont aussi des solutions intéressantes mais qui ont un effet très localisé et moins impactant que les arbres. Néanmoins à Rome, la réduction de la température est de 6 à 12 °C à un mètre d’un équipement de refroidissement par brumisation. Autre solution, les revêtements drainants qui stockent temporairement l’eau, ce qui favorise l’évaporation de l’eau plutôt que son évacuation rapide au réseau. Cela génère un abaissement de la température locale et une augmentation de l’humidité relative de l’air. Ainsi, la ville de Taïwan enregistre une baisse de 6 degrés (de 25 °C à 19 °C) dans les rues constituées de pavés poreux à joints enherbés non arrosés plutôt par de l’asphalte. Rafraichir la ville n’a rien d’utopique.

* L’étude s’appuie sur plusieurs modèles intégrant une partie importante des phénomènes microclimatiques urbains. Les modèles urbains TEB (Town Energy Balance ; Masson, 2000) et SURFEX prennent en considération le fonctionnement énergétique des bâtiments et les interactions entre le bâti et la végétation (ombrages, évapotranspiration).

Vagues de chaleur : renaturer pour rafraîchir la ville … et les territoires

À mesure que les effets du réchauffement climatique se font de plus en plus perceptibles, des solutions naissent de part et d’autre du territoire depuis plusieurs années pour relever ce défi environnemental. Comme celle que David Joly, chef du service voirie pour la communauté de communes de Maremne Adour Côte-Sud, évoquait déjà en 2020 pour Envies de Ville : « On remarque qu’en végétalisant, les températures ambiantes chutent. Alors qu’en été l’asphalte fond sous la chaleur du soleil, les arbres nous aident à perdre de précieux degrés Celsius. Ce qui nous permet par ailleurs d’avoir des espaces durables et de suspendre l’utilisation des climatiseurs », explique-t-il. Dans le sud des Landes, la place de la nature est ainsi redevenue un axe de réflexion central, et un outil d’aménagement pour une vingtaine de communes : « Alors que personne n’essaye de reconstruire le paysage, nous nous efforçons d’être exemplaires, notamment en finançant jusqu’à 50% des projets de désimperméabilisation et de traitement naturel des eaux de pluie. Nous privilégions une végétation liée à l’absorption de l’eau, le creusement de noues et la mise en terre naturelle », détaille David Joly.

Envies de ville : des solutions pour nos territoires

Envies de ville, plateforme de solutions pour nos territoires, propose aux collectivités et à tous les acteurs de la ville des réponses concrètes et inspirantes, à la fois durables, responsables et à l’écoute de l’ensemble des citoyens. Chaque semaine, Envies de ville donne la parole à des experts, rencontre des élus et décideurs du territoire autour des enjeux clés liés à l’aménagement et à l’avenir de la ville, afin d’offrir des solutions à tous ceux qui “font” l’espace urbain : décideurs politiques, urbanistes, étudiant, citoyens…

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