Publié le 24.10.23 - Temps de lecture : 3 minutes

« Refaire la ville sur la ville » : quand la ville de demain existe déjà

Dans le contexte actuel de crise climatique, refaire la ville sur la ville permet de réduire l’impact des métropoles sur l’environnement et de produire un modèle urbain plus durable. Explications.

En France, chaque année, ce sont en moyenne 24.000 hectares de sols vierges qui sont artificialisés par l’extension des villes sur les campagnes, selon le Ministère de la Transition Écologique. Entre 2009 et 2019, ce sont ainsi 276.377 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers, l’équivalent du département du Rhône, qui ont été urbanisés, principalement pour répondre aux besoins en nouveaux logements et en nouvelles infrastructures. 

 Les conséquences de ce phénomène sont bien connues… et elles fragilisent la résilience des territoires : augmentation des émissions de CO2, affaiblissement de la biodiversité, amplification des risques d’inondations, baisse des rendements agricoles.

En guise de solution, la loi Climat et Résilience, adoptée en 2021, comporte l’objectif de Zéro Artificialisation Net (ZAN). D’ici 2031, les communes vont devoir réduire de 50 % le rythme de l’artificialisation, avant d’y mettre un terme (ou de le compenser) en 2050. C’est un tournant radical dans la façon de penser la ville.

Refaire la ville sur la ville pour lutter l’étalement urbain

Bonne nouvelle, pour stopper l’artificialisation des sols, les solutions sont nombreuses : l’enjeu est de mettre à profit le foncier déjà artificialisé, de réhabiliter les espaces inutilisés, de réutiliser bâtiments et infrastructures avec à la clé de nombreuses externalités positives. « Privilégier des formes plus compactes permet de limiter l’artificialisation de notre « ressource sol » qui joue un rôle de puit de carbone, de réduire les émissions de CO2, de préserver la biodiversité et le capital de terres agricole. » explique Brigitte Bariol-Mathais, Déléguée générale de la Fnau (Fédération des Agences d’Urbanisme).

À ce titre, les friches urbaines représentent de vastes superficies vacantes qui peuvent être exploitées pour créer de nouveaux quartiers. À Saint-Ouen, la ZAC des Docks, une zone industrielle de 18 hectares qui abritait l’usine d’Alstom a par exemple été transformée en un écoquartier verdoyant qui offre désormais plus de 2.000 logements, ainsi que des bureaux, et de nombreux commerces et services.


Près d’Orléans, Nexity et Sully Immobilier réhabilitent actuellement l’ancien site des usines Renault/TRW à Saint-Jean-de-la-Ruelle dans le périmètre des berges de la Loire, classé site patrimoine mondial de l’Unesco. Cette friche industrielle de 2,6 hectares a fait l’objet d’importants travaux de dépollution pour pouvoir laisser place dès 2024 aux berges d’Houlippe : un quartier mixte composé de près de 400 logements, des commerces ou encore un hôtel tout en intégrant des espaces végétalisés. Pour que le projet sorte de terre, il aura fallu une quinzaine d’années de tractations, de procédures administratives et une révision simplifiée du Plan Local d’Urbanisme.

 

Les projets de réhabilitation sont de plus en plus nombreux. Pour encourager ce mouvement, le gouvernement a créé un fonds de 750 millions d’euros dédié à ce type de démarche immobilière, tandis que le CEREMA (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) a lancé la première plateforme qui inventorie l’ensemble des friches disponibles en France, avec plus de 8 000 sites d’ores et déjà répertoriés.

 Ce ne sont cependant pas les seuls gisements disponibles car la transformation de bureaux en logement à l’échelle d’un bâtiment ou bien la requalification des zones commerciales en entrées de ville sont également des pistes prometteuses. « Le sujet des entrées de ville est différent de celui des centre-ville. Il est peut-être plus simple à traiter, car il y a souvent, entre les élus, les opérateurs et les usagers, un fort consensus pour les faire évoluer. » précise Jean-Luc Porcedo, Directeur général du pôle Nexity Transformation des Territoires et Président de Nexity Villes & Projets.


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Prendre de la hauteur pour refaire la ville sur la ville

 En complément, d’autres leviers peuvent être actionnés en misant sur la verticalité.  C’est déjà le cas à Lyon où le nouveau PLU prévoit la surélévation des bâtiments pour densifier le parc immobilier. Plusieurs opérations de ce type ont déjà eu lieu, notamment à Saint-Didier-au-Mont d’Or où un bâtiment HLM de deux étages a été augmenté de deux étages supplémentaires en construction bois.  

 L’exploitation des toits-terrasses pourrait également permettre de tirer avantage de vastes superficies trop souvent sous-utilisées, près de 32 millions de m2 rien qu’à Paris selon l’Apur qui a publié fin 2022 la première étude sur le sujet. À Rotterdam, l’association Dakdorpen y installe déjà des tiny houses pour proposer des habitations à faible prix, avec l’objectif de créer à terme de véritables villages verticaux.

 En incitant les acteurs territoriaux à repenser l’aménagement urbain, refaire la ville sur la ville est une opportunité pour favoriser le réemploi, mieux mailler les services au sein des territoires et accélérer la végétalisation et la renaturation.  » Cette évolution oblige aussi à revoir nos modes de vie et nos modèles d’habiter et de se déplacer. C’est un changement culturel qu’il faut opérer en embarquant tous les acteurs. » commente Brigitte Bariol-Mathais,

Densifier le bâti, diversifier les usages, réhabiliter et désartificialiser apparaissent comme autant de moyens pour tendre vers la sobriété foncière et l’immobilier durable. Pour faire émerger la ville bas-carbone de demain, il s’agit désormais de trouver le bon équilibre entre ce qui peut être réutilisé et ce qui doit être construit. 

Envies de ville : des solutions pour nos territoires

Envies de ville, plateforme de solutions pour nos territoires, propose aux collectivités et à tous les acteurs de la ville des réponses concrètes et inspirantes, à la fois durables, responsables et à l’écoute de l’ensemble des citoyens. Chaque semaine, Envies de ville donne la parole à des experts, rencontre des élus et décideurs du territoire autour des enjeux clés liés à l’aménagement et à l’avenir de la ville, afin d’offrir des solutions à tous ceux qui “font” l’espace urbain : décideurs politiques, urbanistes, étudiant, citoyens…

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