Attractivité des villes
Publié le 14.06.22 - Temps de lecture : 3 minutes

Attractivité des villes : quels sont les projets qui marchent ?

Défi climatique, tensions internationales, enseignements de la crise sanitaire… Dans un monde chahuté, quelles visions portent les nouveaux maires français – et les plus expérimentés – pour l’attractivité de leurs villes ? Danielle Licata, directrice de la rédaction de la Revue des Collectivités Locales, partage ses observations sur l’évolution des grands projets urbains.

Deux ans après leur élection, quels sont les sujets prioritaires pour les maires français ?

Danielle Licata : Ils sont évidemment nombreux, mais si je devais n’en retenir qu’un ce serait la mobilité. La mobilisation des gilets jaunes, puis la crise sanitaire, et enfin le contexte d’inflation ont placé ce sujet en haut de la pile. Dans la population, la mobilité représente aujourd’hui un levier pour faciliter l’accès au travail, aux loisirs ou à l’alimentation de qualité. Ce n’est plus seulement une question d’urgence climatique, mais aussi d’égalité entre les habitants et entre les territoires. C’est une des demandes fortes des administrés. Pour y répondre, les élus de terrain savent que les solutions qui fonctionnent dans les métropoles (transports en commun…) ne sont pas adaptées à leurs territoires. Il faut sortir du cliché qui consiste à considérer les habitants de zones rurales et périphériques comme des pollueurs qui ne veulent pas lâcher leur voiture. Ils n’ont tout simplement pas le choix ! De nombreux élus ont pris conscience de cet enjeu et cherchent aujourd’hui à repenser la mobilité dans leurs territoires. Par exemple, en développant des services au plus près des habitants, comme les maisons de santé. Ou en nouant des partenariats, à l’image de la création récente d’une ligne de covoiturage commune entre l’Agglomération Seine-Eure et Rouen Métropole avec la start-up innovante Ecov. Enfin, les élus s’intéressent de plus en plus aux mobilités douces comme le vélo (La Rochelle, Bourg-en-Bresse et Chambéry…) et même la marche à pied avec des actions d’urbanismes favorables aux piétons (Strasbourg, La Chapelle-Glain…).


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Au-delà de la mobilité, quels sont les autres grands projets urbains imaginés par les élus pour l’avenir de leurs villes ?

Danielle Licata : Tous partagent la même vision d’une ville plus propre, plus durable, plus piétonne mais aussi plus verte. Nous savons aujourd’hui que la France vivra en moyenne une vingtaine de jours de forte canicule chaque année d’ici une décennie. Un chiffre qui sera peut-être encore plus important pour les zones les plus chaudes du pays. Les élus doivent donc verdir leurs villes pour aider les habitants à mieux gérer ces périodes. Beaucoup de maires n’ont d’ailleurs pas attendu les lois sur le « zéro artificialisation nette » pour repenser la manière de construire leur ville en recyclant les matières et les espaces à l’abandon. Parmi les exemples récents, je citerais ici le plan nature de la Ville de Lyon, la stratégie de renaturation de la ville d’Angoulême ou encore l’obtention par Angers d’un prix international pour la gestion de son patrimoine arboré urbain. Les maires partagent également l’envie d’améliorer l’attractivité de leurs communes, et particulièrement des centres-villes, en berne depuis des années. La prise de conscience de ce problème par les élus remonte à plus d’une décennie, avant donc le lancement du plan “Action Cœur de Ville” en 2018. Dans la plupart des cas, ce dernier a d’ailleurs permis de soutenir financièrement des projets qui étaient déjà sur le bureau des maires. Sur tous ces sujets de durabilité, de sobriété ou d’attractivité, les villes doivent trouver aujourd’hui des solutions qui correspondent à leur identité. Et s’inscrire dans le temps long. Un seul mandat ne suffira pas. D’ailleurs les nouveaux maires de 2020 n’ont pas encore imposé leur marque. Ils ont juste épaissi le trait sur certains aspects comme l’écologie avec la volonté d’aller plus loin que leurs prédécesseurs.

Pouvez-vous nous citer deux exemples de stratégies territoriales réussies ?

Danielle Licata : Là encore, je ne retiendrais pas forcément les grands projets de métropoles qui disposent d’importantes ressources pour répondre aux enjeux de demain. Je m’intéresserais davantage à des stratégies différenciantes menées par de plus petites collectivités. Parmi les villes moyennes, je citerais Nevers qui a décidé de s’engager fortement dans le numérique en accélérant le déploiement de la fibre mais aussi en créant un campus et incubateur dédiés à ce secteur. L’idée n’est pas seulement de se donner une nouvelle image, mais surtout de créer des emplois et d’attirer une nouvelle population. C’est d’ailleurs la même logique qui a guidé la naissance de campus connectés ou d’antennes locales d’universités et de grandes écoles dans des villes pas forcément étudiantes à l’origine. C’est une façon concrète de permettre aux jeunes locaux d’obtenir des diplômes sans forcément partir habiter dans les grandes métropoles. Dans un autre registre, j’ai suivi également avec intérêt le débat lancé il y a quelques années par le maire de Colmar autour du tourisme de masse et de sa volonté de rééquilibrer sa ville au profit de ses habitants. Ce sont des exemples qui démontrent que les stratégies territoriales évoluent.

Après une décennie de métropolisation, les villes moyennes représentent-elles l’avenir ?

Danielle Licata : Ce sont des sujets qui nécessitent évidemment une certaine prudence. Cela dit, je pense effectivement que les villes moyennes vont prendre leur revanche dans les 10 prochaines années. Les aspirations des jeunes changent. La vie personnelle et familiale devient de plus en plus importante. Est-ce vraiment possible de s’épanouir dans les grandes agglomérations ? Ce n’est pas certain. Et encore moins à Paris. Il est d’ailleurs amusant de voir que les pavillons de banlieue ou les maisons à la campagne ont été largement valorisés pendant le confinement. Pourtant, ces formes d’habitation étaient décriées pour ne pas dire moquées depuis des années. Si les maires des villes moyennes parviennent à répondre à cette aspiration à vivre mieux en proposant des services publics de qualité à leurs administrés, alors cette fameuse revanche deviendra réalité.

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