Modélisation de l'immeuble Essentiel dans le quartier Lyon Confluence
Publié le 25.10.22 - Temps de lecture : 3 minutes

À Lyon Confluence, la frugalité passe par un immeuble sans chauffage ni climatisation

Dans un contexte de crise énergétique, le bâtiment Essentiel, en cours de construction sur l’ancienne friche industrielle réaménagée en quartier mixte de Lyon Confluence, pourrait bien être une réponse à la sobriété à laquelle les pouvoirs publics appellent. Comment ? Grâce à une conception sans chauffage ni climatisation qui ne diminuera en rien le confort des futurs occupants puisque la température restera comprise toute l’année entre 22 et 26 degrés. Coup de projecteur sur l’immeuble Essentiel, un bâtiment frugal qui pourrait bien devenir le futur standard du secteur de la construction.

Un bâtiment frugal ? Voilà bien une association de mots surprenante quand on sait que la construction est l’un des secteurs les plus énergivores et l’un des plus gros émetteurs de CO2. Toutefois, la situation est amenée à évoluer. En effet, l’urgence climatique ainsi que l’application imminente de la RE-2020 comme cadre légal poussent les acteurs de la construction et de l’immobilier à chercher des réponses concrètes et efficaces pour limiter l’impact environnemental de leurs projets. Essentiel, développé par Nexity, est pour Loïc Daniel, directeur général délégué chez Nexity « l’exemple d’une réponse aux exigences très élevées des utilisateurs en matière environnementale et de confort par des raisonnements disruptifs et des choix radicaux sur la manière de concevoir les bâtiments ».

UNE FRUGALITÉ PENSÉE À TOUTES LES ÉTAPES

Le bâtiment qui comprendra des bureaux ainsi que 25 logements, s’inspire du bâtiment pilote « 22-26 » en référence à sa température intérieure, réalisé par l’architecte Dietmar Eberle en 2013 en Autriche. Il s’inspire lui-même du savoir-faire des anciens pour se protéger du chaud et du froid comme la construction de murs épais qui protègent des apports du soleil ou l’utilisation de matériaux isolants comme la chaux qui régule efficacement le taux d’hygrométrie. Et ce, « tout en mobilisant les meilleures technologies », souligne Loïc Daniel. « C’est un bâtiment intelligent » complète Anne Speicher, architecte chez Baumschlager Eberle, à l’instar des volets motorisés placés dans les menuiseries qui adaptent automatiquement leur ouverture pour l’optimisation du confort intérieur. « Les habitants pourront également suivre en temps réel leur consommation », poursuit-elle. La chaleur ou la fraîcheur en fonction de la période de l’année, sont emmagasinées par les sols et les murs et sont restituées tout au long de la journée. « En hiver, les très faibles déperditions énergétiques sont compensées par les personnes, les ordinateurs, les portables, les imprimantes, et même les machines à café qui sont des sources de chaleur » explique Loïc Daniel. Cette conception bioclimatique permet au bâtiment de maintenir une température comprise entre 22 et 26 degrés en toutes saisons sans ventilation mécanique (celle-ci se fait de manière naturelle grâce à des logements et bureaux traversants) ni chauffage ou climatisation, importants émetteurs de gaz à effet de serre. Essentiel ne consomme dès lors que 30 % de la consommation habituelle d’un bâtiment classique et une bonne partie de cette énergie sera produite sur place grâce aux installations solaires sur la toiture. Une véritable frugalité énergétique !


À lire aussi


Débarrassé des équipements techniques lourds habituels, le bâtiment est épuré et offre ainsi une esthétique sobre avec plus de hauteur sous plafond contribuant à un meilleur confort pour les futurs occupants, renforcé par une excellente isolation acoustique. Cette absence d’équipements contraignants s’accompagne d’une conception pensée pour la réversibilité. « Par exemple, le poids du bâtiment est repris par la façade et un anneau central permet le passage des flux. Les espaces intérieurs sont conçus de manière à recloisonner les volumes et les ouvrir selon les besoins » explique Samuel Linzau directeur général de la Société Publique Locale où sera implantée Essentiel. « On ne retrouve pas de coin porteur entre les logements contraire aux conceptions classiques des bâtiments » complète l’architecte. Ainsi la partie de l’immeuble qui comprend des bureaux pourra facilement être reconvertie en logements dont la typologie pourra être reconfigurée selon les évolutions familiales et sociétales. « Il faut prendre en compte des transitions de plus en plus rapides dans les usages, en replaçant l’utilisateur final au cœur des projets pour mieux les concevoir » affirme encore Samuel Linzau. Cette approche permet « d’inscrire le potentiel d’usage du bâtiment dans la durée » poursuit-il et donc de limiter la démolition reconstruction du bâtiment. L’empreinte carbone de l’immeuble sur l’ensemble de son cycle de vie est ainsi considérablement réduite. Enfin, l’utilisation de certains matériaux est également pensée pour minimiser l’impact environnemental. L’architecte explique « la partie supérieure du bâtiment sera enduite de chaux et d’agrégat bio sourcés qui contribuent à la minimisation de l’empreinte carbone ».

LES DÉFIS À RELEVER

Toutefois, comme dans toute démarche d’innovation, il a fallu composer avec un certain nombre de défis. Des contraintes administratives tout d’abord, puisque le secteur de la construction est soumis à de nombreuses normes dont les fameux permis de construire. Cette contrainte a été levée grâce au permis d’innover qui encourage l’exécution de nouveaux modes constructifs. Concrètement, le permis d’innover permet de prévoir, dès l’origine, qu’un bâtiment pourra accueillir des bureaux, des logements ou tout autre activité sans avoir besoin de recourir à des permis de construire spécifiques, ce qui allège considérablement les démarches juridiques et techniques. D’un point de vue financier, il a fallu trouver une adéquation dans le bilan de l’opération. « En tant qu’aménageur », explique Samuel Linzau, « nous disposons du levier des charges foncières, dont nous limitons le montant pour laisser aux opérateurs une marge de financement de l’innovation ».

Première expérimentation sur le territoire national, Essentiel est amené à émerger significativement dans l’hexagone pour répondre à la triple exigence environnementale, économique et sanitaire. Mais pour développer ce concept architectural, il va falloir relever le défi de développer ou de réactiver un certain nombre de filières de matériaux, en privilégiant les acteurs écoresponsables et la proximité des sources d’approvisionnement. Une démarche de long terme dont certains acteurs se posent en précurseur.

Envies de ville : des solutions pour nos territoires

Envies de ville, plateforme de solutions pour nos territoires, propose aux collectivités et à tous les acteurs de la ville des réponses concrètes et inspirantes, à la fois durables, responsables et à l’écoute de l’ensemble des citoyens. Chaque semaine, Envies de ville donne la parole à des experts, rencontre des élus et décideurs du territoire autour des enjeux clés liés à l’aménagement et à l’avenir de la ville, afin d’offrir des solutions à tous ceux qui “font” l’espace urbain : décideurs politiques, urbanistes, étudiant, citoyens…

✉️ Je m’inscris à la newsletter